Quand je suis ici, je suis dans ton monde,
Quand je suis ici, je suis chez toi,

Quand je suis ici, je suis toi,

Quand je suis ici, je suis toi dans mon monde…

Je n’ai ni les codes, ni les repères, ni les mots.
Tout comme toi, j’ai besoin d’être compris, d’être rassuré, d’être accompagné.

Besoin de reconnaissance, de protection, de ta confiance.

Quand je suis ici, je sais ô combien j’ai besoin d’aide.
O combien j’ai besoin de l’aide de toutes ces drôles de personnes qui se mettent en scène telles que
les AES, AVDH, psychomot., ergothérapeute, infirmières, ES., ME…

Et comme si ce n’était pas déjà assez difficile, les sigles et acronymes me font la tête :
MDPH, AGEFIPH, AAH, RQTH, FALC, FAM, TSA, PMR et tant d’autres encore.

Quand je suis ici, je me sens seul,
Je cherche un papa, un câlin, une attention, un briquet…

Quand je suis ici, c’est moi le « handicap »

Même si pour toi, mon handicap à moi n’est pas visible.

Et pourtant, j’ai ces difficultés à communiquer avec toi,

Je ne m’exprime pas comme toi,

Mes comportements peuvent te sembler bizarres ;

Comme toi, je suis infoutu d’agir sur mon chromosome 21.

Des savants, des sachants, des puristes utilisent de vilains mots pour définir ta « case » :
Diagnostiqué « trisomique », classé autiste, stigmatisé « déficient ».

Ils n’ont rien trouvé pour définir ma case dans ta case.

Ni grille, ni nomenclature, ni catégorie

Je me sens différent mais pas triste,

Je me sens exclu mais pas abattu.


Je te trouve davantage artiste qu’autiste :
Tu fais de la musique, du dessin, de la cuisine, du bricolage, du jardinage, de la poterie, de la vidéo…

Mais où est ton public ?

Je veux bien être « un » de « ce » public là !!

Avec tous les copains aussi assidus que moi, aux fonctions et sigles aussi drôles que par chez toi :

Des archis, des chargés de mission, des éducs du « SPS » de « L’AAE », des jeunes des « QPV »

On t’offrira une scène.

« Une drôle de scène » !

Pour faire de « drôles de fêtes. »

Une scène unique, singulière et ouverte.

Comme pour nous, on lui demandera d’être autonome, adaptée et inclusive.

Comme nous, elle n’y arrivera pas et on s’en fout.

Car au fond,

L’essentiel n’est pas sa forme, son aspect extérieur, sa capacité ergonomique.

Non ! non ! et non !!

Dans ce monde qui sera le nôtre sur cette scène,

L’essentiel sera notre sensibilité.

Ce lieu d’accueil des émotions qui nous unit et nous rassemble dans ces instants éphémères.

On convoquera tous ces artistes déjantés

Qui invoqueront nos sensations

Qui évoqueront l’excitation
Et vaqueront à l’expression.

L’artiste autiste, l’autiste artiste troubleront la fête
Tous nos maux se confondront

Tous nos mots s’entremêleront.

Vives les troubles, l’agitation, l’exaltation

Tes symptômes seront les miens

Tes symptômes seront conformes


J’ai dit « conforme » ??

Fautil une scène pour se sentir ordinaire ou normal ?

Fautil une scène pour la conformité ?


Si c’est le cas, sabordons ce projet d’entendement collectif et allons ensemble chercher
l’exceptionnel, l’improbable et l’invraisemblable.

Car aujourd’hui il faut des êtres exceptionnels pour faire de futurs projets improbables et défier l’invraisemblable du passé.


L’alchimiste t’expliquerait que ce n’est pas le sorcier qui fait la magie, mais ses ingrédients :

Et ici, il y a tous les bons ingrédients.


Quand je suis ici, j’y vois de la bienveillance,

Quand je suis ici, j’observe le respect,

Quand je suis ici, je rencontre la dignité,

Quand je suis ici, je partage ton humanité.


Faisons d’ici un « ailleurs »

Que cet « ailleurs » ne soit pas comme hier et aujourd’hui

Ancré de murs, de barrières et de cloisons

Faisons d’ici « notre ailleurs »
Et que cet ailleurs soit celui qui nous fera vibrer encore sur nos drôles de fête.